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11 janvier 2013 5 11 /01 /janvier /2013 16:49

 

 

( à partir du cours effectué au D.U des bases conceptuelles des psychothérapies analytiques, à Strasbourg)
Nicolas JANEL – janvier 2013


Introduction 


Le terme de structure peut avoir toutes sortes d’acceptions dans une multitude de contextes, parfois exclusifs les uns des autres. Il y a souvent une difficulté de savoir de quoi on parle vraiment, d’en connaître sa définition exacte, ainsi que sa portée dans la clinique. On en garde souvent qu’une « notion » - terme qui montre qu’on a bien une idée unique de quoi on parle ; on a « une notion », mais ça reste flou. C’est-à-dire que c’est tout un travail pour en faire un concept. 


I. Notion de structure et Concept de structure 


Vous voyez, je fais une distinction entre les termes de Notion de structure et de Concept de structure. Notion et concept sont deux unités élémentaires abstraites, on peut les placer à deux extrémités d’une ligne avec d’un côté, la « notion » : imprécise, dans le domaine du perçu, recouvrant une idée plutôt vague aux contours généralement imprécis, communément admise, suffisamment partagée pour que tout le monde s’accorde et se comprenne. Et de l’autre côté, le concept : précis, dans le domaine du conçu, du construit, dont les caractéristiques sont listées et discriminées, toujours circonscrit dans un champ de référence identifié, et en dehors duquel il n’est plus opérant. 
Par exemple, avec la notion d’arbre, on désigne aussi bien un chêne, un peuplier, un palmier. Mais avec le concept d’arbre, le botaniste n’inclura pas le palmier dans ce concept d’arbre car il ne possède pas de tronc mais une tige non ramifiée appelée stipe, son bois ne possède pas le cambium nécessaire pour assurer sa croissance en largeur, et il n’a pas de branches mais des palmes qui ne se subdivisent pas. En botanique, le palmier n'est pas un arbre mais une plante. Par conséquent, pour le palmier : on a une notion d'arbre, mais si on suit le concept botanique, c'est une plante !
On comprend ainsi que la différence entre « notion » qui est un donné, un perçu, et « concept » qui est un construit, un conçu, tient dans l’analyse scientifique de ses caractéristiques dans un champ donné. 
Ceci-dit, en suivant Lanterilora1, nous pouvons maintenant nous lancer à travers différents concepts structuraux retrouvés au cours de l’histoire, afin d'en dégager différents points généraux de la notion de structure, c'est à dire pour s'en faire une idée générale, communément admise, et suffisamment partagée pour que tout le monde se comprenne. 


II. Différents concepts structuraux au cours de l’histoire


II.1. En mathématiques.
C’est, semble-t-il, dans cette discipline que les phénomènes structuraux ont été reconnus pour la première fois. Par exemple, dans les combinaisons du groupe de Klein (Barbot) ou devant les différentes combinaisons d’un même schéma repérable dans un grand nombre, de contes de fées du folklore russe (Propp) où, parmi un nombre élevé de contes, on retrouve une structure commune, avec des éléments constants (le héro, la femme aimée, l’enfant, l’anti-héro, etc.), éléments ayant les mêmes modalités d’articulation. On en ressort des propriétés générales correspondant à notre notion de structure.  


II.2. En linguistique structurale.
Ferdinand de Saussure introduit une structure dans le langage, en proposant des couples d’opposition : 
La langue est couplée à la parole : la langue comme système grammatical, la parole comme effectuation concrète et singulière de ces systèmes. 
Le signifiant est couplé au signifié : le signifiant comme face acoustique, le signifié comme face sémantique de chaque signe, sachant que le rapport de l’un à l’autre demeure conventionnel et arbitraire. 
Le syntagme est couplé au paradigme : le syntagme comme suite dans la chaîne parlée, le paradigme comme ensemble de tous les signifiants qui, à une place dans cette chaîne, auraient pu venir, à la place du signifiant, qui y figure réellement. 
Et de manière très schématique, la mise en système de ces quatre couples d’opposition, constitue la structure du langage. 


Remarque : Lacan compare justement la structure de l’inconscient à celle du langage : « l’inconscient est structuré comme un langage ». D'où sa réutilisation des termes linguistiques ( signifiant, signifié, métaphore, métonymie...), mais pour des emplois différents, au sein de sa « linguisterie ».
Pour le structuralisme en linguistique, Saussure donne une illustration avec la métaphore du jeu d'échec.
Métaphore du jeu d’échec :
La métaphore du jeu d’échec fait bien comprendre la distinction entre la langue et la parole, et l’arbitraire et le signe. 
Saussure compare la langue, en tant que système, aux règles qui gouvernent les déplacements possibles du jeu d’échec. La parole correspondrait alors, à des situations réelles, de toutes les parties possibles. 
La matière des pièces ne joue aucun rôle, ni d’ailleurs leur forme (or, bois, en croix, rectiligne...), il suffit qu’on sache, par exemple, que le roi se déplace d’une seule case, de tous les côtés, et qu’on puisse les distinguer des autres pièces. Saussure montre qu’il en va de même avec les mots qui sont dans l’arbitraire du signe. 
La linguistique se complexifie ensuite. Vient le phonème, plus petite unité de son ; le sémantème, plus petite unité de sens. 
Jakobson introduit dans leur modalité d’interaction la métaphore et la métonymie, ce que reprendra Lacan, pour la structure de l’inconscient. 


II.3. L’anthropologie sociale de Claude Lévi-Strauss.
J’en parle très brièvement, parce que c’est à partir des lectures de Lévi-Strauss que Lacan est introduit au structuralisme. C'est par ce passage qu'il arrive à sa théorie de « l’inconscient structuré comme un langage ». 
Lévi-Strauss montre que pour étudier le problème de la prohibition de l’inceste, il faut étudier l’échange restreint, puis l’échange généralisé des femmes et qu’on ne peut en maîtriser la diversité infinie, qu’en y discernant un certain nombre de variantes d’une structure élémentaire, transposable et pouvant servir de modèle. Il fait ressortir une structure à quatre termes : père, mère, fils et oncle maternel. 
C’est dans son livre « les structures élémentaires de la parenté » qu’il développe ces hypothèses. C’est une bonne illustration concrète de la méthode structurale. 
    Voilà pour cette rapide traversée à travers différents champs où la structure apparaît. On peut maintenant tirer quelques traits caractéristiques de la notion de structure. 
Elle apparaît comme irréductible à la somme discrète de ses éléments, elle s’avère transposable, elle tire son intelligibilité des rapports de ces éléments entre eux, elle est systématique, elle cherche à rendre situationnelle la notion de totalité, elle permet de maîtriser un ensemble fini, de grande taille, non par son dénombrement exhaustif, souvent impraticable, mais par l’emploi judicieux d’un modèle signifiant. 
Voilà pour la notion de structure, c’est-à-dire de la structure en général. 


III. La structure en psychopathologie


    La psychopathologie - des mots grecs : psukhê :« âme », et pathos : « maladie » - c’est vaste ! C’est « l’étude raisonnée des troubles mentaux, ou psychologiques, et des troubles du comportement ». C’est un terme utilisé depuis la fin du 19è siècle, ça concerne donc énormément de théories. Je parlerai de la conceptualisation de la structure chez Freud, chez Lacan, en passant par l’Ego-Psychanalyse des post-freudiens. 


    III.1. Les deux topiques freudiennes 


Freud n’est pas pris dans le courant structuraliste. Sa démarche est orientée, d’abord, vers l’étude du singulier et de l’histoire du patient. C’est avant tout une pratique. Mais, pour fonder sa théorie, c’est-à-dire pour fonder une connaissance d’ensemble, comme dans un mouvement d’inflexion du souci de singularité, sa théorie renvoie peu à peu, à la notion de structure. C’est-à-dire qu’en parallèle de sa pratique, à partir du singulier, il théorise certaines constantes, que le psychanalyste pourrait retrouver d’un patient à l’autre. De l’histoire singulière dynamique, sont conçus des points de vue topiques et économiques qui se placent donc du côté de la structure. L’intérêt pour l’histoire singulière est ainsi encadré, par des références générales, qui relèvent d’un registre structural. Ainsi, les Topiques Freudiennes, consistent en une représentation du psychisme, comme une interaction dynamique d’instances, réparties dans l’espace, souvent conflictuelles. 


Remarque : Freud accorde une valeur de fiction à l’appareil psychique, sans réalité organique sous-jacente. 


III.1.a. Première Topique (de 1900 à 1920)

    Très brièvement, on retrouve les éléments :
Inconscient – Préconscient – Conscient




Ces éléments interagissent ensemble pour former la structure psychique. Le Moi est déjà présent, il gère les conflits et les clivages, et joue le rôle d’une sorte de par-excitation. 


        III.1.b. Deuxième Topique (1920 – 1939)


    Sa deuxième topique arrive après la découverte des compulsions de répétition des névroses traumatiques, et l’élaboration de la pulsion de mort, dans « Au-delà du principe de plaisir ». 
Les éléments sont : 
Ça – Moi – Surmoi 


Ces éléments interagissent ensemble pour former la structure.


Remarque : les deux topiques ne sont pas superposables ! 


A partir de là, Freud individualise trois grands types de structure : 
Psychose ;
Perversion ;
Névrose.
Ceci, en fonction des fixations ou régressions principales de l’évolution libidinale (l’œdipe en étant une étape déterminante) et du degré de maturation du moi. 
De ces deux points découlent les modes d’établissement de la relation objectale et leur évolution, et les mécanismes de défense et d’adaptation. 
Parmi les névroses (Psychonévroses), névrose obsessionnelle, phobie (hystérie d’angoisse), hystérie (de conversion), une de leurs caractéristiques communes est que le Moi fait alliance avec le Surmoi ( du côté du principe de réalité) contre le Ça (du côté du principe de plaisir). Leur mécanisme principal est le refoulement. Les symptômes sont issus d’un retour du refoulé et apparaissent comme des compromis. 



schéma à demander à l'adresse nicojanel@gmail.com
    
La psychose est mise du côté des Névroses narcissiques, avec une libido essentiellement centrée sur le Moi. Dans ce cas, le Ça et le Moi font alliance contre la réalité (Surmoi faible). Le mécanisme principal est le déni de la réalité, à l’origine du délire. 


schéma à demander à l'adresse nicojanel@gmail.com



Pour la perversion, le mécanisme principal est le déni de la castration. C’est-à-dire, en ce qui concerne le complexe d’œdipe, le complexe de castration est dénié. 


    Voilà brièvement pour Freud. Il est ensuite suivi par ceux qu’on appelle les post-Freudiens, avec l’Ego-Psychanalyse. 


    III. 2. L’Ego-Psychanalyse


    J’évoque l’Ego-Psychanalyse car on ne peut éviter de parler de Jean Bergeret. Il a fait un livre assez pointilleux sur le sujet qui nous occupe ici : « La personnalité normale et pathologique ». 
De plus, critiquer l’Ego-Psychanalyse me permettra de parler des apports de Lacan, qui s’y est opposé, ce qui lui a coûté de se faire renvoyer de l'IPA.
L’Ego-Psychanalyse est une poursuite des apports de Freud par ses successeurs, dont sa fille Anna, en est la principale représentante. La théorie est centrée essentiellement autour du Moi, avec comme but dernier de la cure, l’identification au Moi-fort de l’analyste de la part de l’analysé. Or, l’Ego-Psychanalyse, comme dans le livre de Bergeret sur les structures, ne prend pas du tout en compte les apports de Lacan, ça reste fixé sur le Moi de la deuxième topique. 
Pourtant, Lacan apporte un plus incontournable pour la structure quand il interprète la phrase de Freud « Wo es war soll ich werden », non plus comme « Là où est le ça, le Moi doit advenir », mais comme « Là où c’est, je dois advenir ». C’est-à-dire que Lacan montre que le Moi ne peut pas venir à la place du ça. C’est le sujet, le « je », nouveau concept en psychanalyse, qui advient là où se trouve le ça, déterminé par le signifiant. 
Le Moi se distingue alors comme un noyau de l’instance imaginaire dans la phase dite, du « stade du miroir ». L’enfant se reconnaît dans sa propre image, cautionnée dans ce mouvement, par la présence et le regard de l’Autre (Mère ou substitut), Autre qui l’identifie, le reconnaît simultanément dans cette image. 
Problème : à cet instant, le « je » est capté par ce Moi imaginaire. Le sujet, qui se retrouve pris dans un leurre imaginaire – « leurre » car le discours de ce Moi est un discours de semblant ayant l’apparence d’être le seul discours possible de l’individu – alors qu’existe, comme en filigrane, le discours de l’inconscient. 
Lacan amène donc les concepts de Sujet, de désir, de signifiant. 
Ce qui change tout quand on veut réfléchir à la structure, puisque la structure sera celle du sujet de l’inconscient, et non celle du Moi. 
Ça change tout aussi pour la pratique, c’est d'ailleurs lié, puisque le but ne sera plus l’identification au « Moi-fort » de l’analyste mais plutôt de faire en sorte que « le désir se signifie », de permettre «  plus de sujet », pour le dire très rapidement.


    III. 3. La structure chez Lacan.


    De quoi la structure est-elle faite chez Lacan ? Il utilise, comme précédemment dit, les idées du structuralisme et définit la structure psychique comme un système de signifiants caractérisé par leurs valeurs oppositives et leurs écarts différentiels, et qui se présente comme un ordre qui n’est produit par aucune raison individuelle. 
On retrouve donc, dans cet ordre, différents éléments (les signifiants) ayant certaines règles de relation émanant des faits même d’opposition et d’écarts différentiels enter eux. 


Exemple : Pour bien comprendre la mise en place de règles de relation, qui émergent de la mise en opposition d’éléments, telle une Loi, je vais vous donner l'exemple de la chaîne de Markov. 
So on établit au hasard une suite de signes «+ » et de signes « - », et qu'on y choisit, ensuite, de manière arbitraire, une organisation en triplets, il y aura :
des triplets homogènes (+++) ; (- - -) ; 
des triplets hétérogènes symétriques (+ - +) ; (- + -) ; 
des triplets hétérogènes dissymétriques (++ -) ; (- + +).


Et bien vous allez constater que, ar le simple fait de regrouper en triplet, une impossibilité arrive dans cette suite qui est pourtant établit complètement au hasard : une impossibilité d’obtenir un triplet hétérogène symétrique après un triplet homogène :


    triplet homogène = (- - - )  →   - (- - -) =  triplet homogène
                                                    - (- - +) = triplet hétérogène dissymétrique
                                =  (+++)  →  +( ++ -) = triplet hétérogène dissymétrique
                                                    + (+++) =  triplet homogène
                                                                =  impossibilité que suive un triplet hétérogène
                                                                        symétrique après un triplet homogène.


Une Loi s'établit, c'est à dire une règle de relation s'établit entre les éléments, par une simple intervention extérieure – le choix arbitraire d'organiser la chaîne en triplet.
Avec toutes les réserves à mettre, on peut trouver une similitude de cet effet de structure avec les signifiants. Ainsi, on peut citer la phrase de Lacan présente dans le dictionnaire de psychanalyse de Chemama : « la structure, c’est l’effet que la combinatoire pure et simple du signifiant, détermine dans la réalité où elle se produit ». Et cette combinatoire, c’est-à-dire cette structure de l’inconscient, Lacan la compare à celle du langage ! 
C’est la fameuse phrase « L’inconscient est structuré comme un langage ». Mais attention, ce n’est pas le langage , c'est comme...! 
A partir de cela, on peut réfléchir à l’instauration de cette structure psychique, faire toute une métapsychologie, même si ça tombe rapidement dans un délire, mais ça permet d’avoir une conceptualisation de cette structure.


III. 4. Instauration de la structure psychique  


    Alors il y a deux idées principales : celle de la genèse de la structure et celle du surgissement de la structure. 
La différence est qu’avec l’idée de la genèse, il y a l’idée chronologique de développement. Avec l’idée du surgissement, la structure possède d’emblée tous les éléments : on raisonne en termes de temps logique. 
    
III. 4. a. La genèse
    
    L’illustration classique de la genèse    part du cri de l’enfant lors des expériences de satisfaction primordiale. L’idée, c’est que l’enfant, masse organique, rencontre l’apercetion d’un Autre maternel. Et cet Autre maternel reconnaît et entérine le sens du cri, par une « interprétation adultomorphique organisatrice ». Cette interprétation, reposant sur le désir de cet Autre maternel, fait entrer l’enfant dans le monde du signifiant. C’est-à-dire, cri = faim, bébé crie = maman interprète qu'il a faim. Il s’agit d’un « hameçonnage » du réel du corps de l’enfant, par les signifiants de l’Autre maternel. 
A partir de quoi , on peut construire toute la genèse de la structure pour le sujet, dans son lien à l’Autre, avec les phénomènes de condensation (Métaphore chez Lacan) et de déplacement (Métonymie) qui tissent, au fur et à mesure du développement, la structure de la chaîne signifiante, capitonnée elle-même aux signifiés, comme l’illustre le graphe du désir de Lacan. 
    La métonymie traduit la fonction de conversion des signifiants entre eux. Vous savez que Lacan dit que le désir n’est que « métonymie du manque à être ». Manque à être pouvant être compris, ici, comme une impossibilité pour l’enfant, de retrouver cette première satisfaction.
    La métaphore traduit la fonction de substitution, d’un signifiant à un autre, par lequel le sujet est représenté. La phrase, là, c’est « Un signifiant (S1) représente le sujet pour un autre signifiant (S2) ». Et (S1), c’est le signifiant maître qui vient de l’Autre, lors de cet hameçonnage. 



III. 4. b. Le surgissement 

    L’idée du surgissement, par contre, c’est que l’enfant rencontre un ordre sensé, et relationnel, déjà installé. C’est l’ordre symbolique, dont les parents ne sont que des porteurs. C’est une reproduction de la structure, déjà existante dans le milieu où l’enfant apparaît. C’est-à-dire qu’auparavant, il y a une structure externe à laquelle l’enfant se trouve assujetti à partir d’un discours ambiant. Et tout-à-coup, cette structure se met à fonctionner, sous la gouverne d'un « je ». 
Et ce passage, du nourrisson, soumis aux besoins, à l’individu affecté d’un inconscient, se fait par l’identification. 
Après ce passage, il n’y a plus d’accès au monde antérieur au langage, monde de la jouissance, monde animal.


Donc voilà, pour ces deux idées de surgissement et de genèse, où l’on voit que se produit, autre phrase de Lacan, « le rapport organique du désir avec le signifiant ». Ça comporte l’idée que le désir du sujet se fonde au niveau de la parole de l’Autre. C’est-à-dire que l’enfant est assujetti dans son désir, dans une parole cautionnée, en fonction des signifiants de l’Autre.
On voit que, pour que quoi que ce soit s’établisse d’intersubjectif, à partir du moment où l’Autre parle, il est nécessaire aux satisfactions de l’homme, de passer par l’intermédiaire de la parole. 
Et en fonction des différentes modalités de passage, se déterminent les différentes modalités de structure psychique. C’est-à-dire en fonction dont va se faire cette négociation d’entrer dans le monde symbolique. 
Dans cette transmission de l’ordre symbolique, la fonction de castration a un rôle déterminant, le rôle de légitimer la prévalence de l’absence, inhérente à la condition langagière. (Vous vous souvenez « le désir n’est que métonymie du manque à être »)
Avec la castration, la fonction paternelle apparaît comme un après-coup logique de la coupure d’avec le réel, qu’impose la prise dans le langage. La fonction paternelle permet l’inscription de l’irréductibilité de la perte. (Perte, je le répète, inhérente à la prise dans le langage). 
Ceci, par exemple, en signifiant à l’enfant qu’il n’est pas tout pour sa mère. La castration permet au sujet de se réapproprier le système symbolique et d’ « ek-sister » hors de l’aliénation maternelle ; c’est-à-dire hors d’un assujettissement total à l’Autre. L’enfant passe du « ça » parle, « ça » pense, au « je » parle, « je » pense. 
Et cette  impossibilité d’être « tout pour l’Autre Maternel » (c’est-à-dire son phallus) est dans le meilleur des cas, présent dans le discours inconscient de la mère, c’est-à-dire qu’elle est elle-aussi manquante (Ⱥ). C’est donc structural, et d’emblée déjà là, avant que l’enfant ne naisse, dès qu’il est parlé. 
Donc, tel le jeu du casse-tête qui nécessite une case vide pour que les autres pièces puissent se déplacer, il est nécessaire à la structure névrotique d’être trouée, ce qu’assure la fonction paternelle. Nom du père, comme agent œdipien, qui permet la soustraction de jouissance nécessaire à une subjectivation névrotique. Ce qui n’est justement pas le cas dans la psychose où il y a forclusion du Nom du père. Et dans la perversion, déni de la castration. 


Voilà, alors tout cela dit, je voudrais encore préciser un point. Cette structure est dynamique, cela ne suit pas le modèle de la structure du cristal qui est figé – modèle qu'utilise d'ailleurs Freud au cours de l'élaboration de sa théorie. C'est différent de la structure comme coupe synchronique, ce n'est pas comme une photo à un moment donné. C'est pour cela que les gens peuvent aller mieux après une cure, cela suit la dynamique du transfère qui est justement mouvante.


Enfin, dernier point, il est important de préciser qu'aujourd'hui, on est davantage dans une clinique du clivage (Spaltung), où on est tous porteurs de tous les mécanismes. Même s’il y a une prépondérance de certain mécanismes chez chacun, c'est à dire qu'on est de manière prépondérante soit névrosé, soit pervers, soit psychotique, il y a un équilibre de tous ces mécanismes chez tout le monde. Ainsi, la psychose n’est pas hors jeu de la structure normale. C’est une question de proportion de mécanismes, qui évolue de plus dans le temps. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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